Rappelez-vous quand vous étiez en cours de mathématiques, et qu’un graphique vous permettait mieux d’interpréter les données d’une fonction. Ça y est vous y êtes ? Eh bien mélanger UX et Data c’est comme résoudre l’équation : design de données = (data+UX) x (data + technique).
À l’heure où la tendance de fond est à la visualisation et à la compréhension d’indicateurs clés, il est peut-être temps d’intégrer en amont de tout projet de DataViz, ces deux corps de métier.
Sophie, Responsable de projets Smart Data nous explique pourquoi. Entretien.
Aujourd’hui la collecte et l’exploitation de la data sont dans toutes les conversations. Pourtant lorsque les équipes d’UX designers se penchent sur une refonte du parcours client ou utilisateur, les datascientists sont rarement invités. Et inversement, quand les datascientists créent des tableaux de bord interactifs. Pourquoi la collaboration entre ces deux métiers devrait être à l’avenir un prérequis à tout projet du genre ?
Ce n’est qu’à l’usage, que l’on se rend compte que ces deux métiers sont complémentaires. Par définition, la donnée est une information brute donc neutre. Là où la donnée devient intéressante c’est lorsqu’elle est interprétée puis croisée aux études comportementales menées par les UX et in fine reliée à un contexte pour lui donner du sens et donc de la valeur. En donnant du sens à des données complexes, on facilite la prise de décision sur des informations clés.
Aujourd’hui, pour offrir de la valeur aux utilisateurs, datascientists et UX designers doivent collaborer pour humaniser la donnée. Dans la conception d’un tableau de bord par exemple, les tests utilisateurs permettent d’analyser l’existant, d’identifier ce qui ne fonctionne pas, ce qui est illisible ou encore inaccessible pour les métiers.
Par ailleurs, les UX peuvent faire des préconisations sur de nouvelles fonctionnalités et les datascientists peuvent être force de proposition sur de nouveaux indicateurs pour visualiser les données.
Pourquoi est-il nécessaire d’associer UX et data ?
Pour améliorer l’expérience utilisateur au sens large, et le produit final au sens strict. Convoquer ces deux compétences dans un projet permet également d’impliquer les métiers dès la phase conception.
En général, cela permet une meilleure compréhension de l’outil proposé, une meilleure prise en main. Comme les besoins ont été recueillis en amont, et qu’on y répond de façon ergonomique avec des indicateurs pertinents, on fait tomber le mur des réticences et on accélère l’adoption.
Que peut apporter un datascientist à un projet « UX » ?
Tout d’abord, un datascientist peut apporter son aide aux UX dans la phase de recueil du besoin utilisateur. Il peut collecter les données open source ou dans les bases de données internes à l’entreprise afin d’en dégager des tendances.
Il peut aussi créer une enquête ou sondage. Les datascientists, dans une approche « data quantitative », ont l’habitude de poser des questions très spécifiques aux utilisateurs pour récolter un maximum de données utiles éviter les biais.
Et ainsi, dégager à travers un questionnaire ciblé des indicateurs clés. Il peut aussi participer à la compréhension du ressenti de l’utilisateur en exploitant des masses de données non structurées grâce à des techniques de text mining qui permettent l’analyse d’avis produit sur des forums de discussions ou des réseaux sociaux.
Et inversement ?
Le livrable d’un projet data, en 2020, est souvent un outil de DataViz, dont l’ancêtre serait le kilomètre de slides ou de tableaux Excel. Aujourd’hui, les métiers ont besoin de plus en plus d’une visualisation dynamique tout en gardant la même qualité d’information.
Un UX designer peut améliorer le rendu et l’expérience utilisateur d’un Tableau de Bord dynamique. Dans ce cas, L’UX designer peut intervenir en apportant son expertise de design d’écran (voir 14 commandements).
Cela peut se faire en amont de la construction, à travers un atelier co-animé avec le datascientist « Dessiner, c’est gagné » ou en cours de projet, lors de tests utilisateurs des dashboards construits. Il existe un autre cas où l’UX designer joue un rôle important.
Certains services disposent déjà d’un reporting de DataViz mais ne l’utilisent jamais car trop éloigné des usages des utilisateurs et peu ergonomique. En auditant l’existant via une vidéo par exemple, il peut évaluer les failles, comprendre pourquoi l’utilisateur refuse l’outil qui a déjà été créé, ou encore appréhender les freins.
Dans une phase de cadrage, quels sont les éléments qui vont déterminer la réussite du projet ?
L’adhésion des métiers est déterminante pour tout projet Data & UX. Les impliquer dès le début, notamment pour recueillir leurs attentes, besoins, frustrations est fondamental.
C’est la condition sine qua none pour que le projet soit accueilli favorablement.
Dans quelle mesure un datascientist étend la connaissance utilisateurs ?
Dans les faits, un datascientist aide à affiner la proposition de valeur de services grâce au traitement massif de données. Car, comme je le précisai précédemment, notre capacité à analyser d’énormes volumes de données permet d’approcher une cible particulière mais aussi de capter jusqu’au ressenti d’un utilisateur au cours de son parcours.
Ainsi, on peut mesurer la satisfaction utilisateur à travers une analyse des réseaux sociaux (text mining), l’engagement (partage, visites…), l’adoption d’un produit ou d’une appli (mise à jour, achats…), la rétention (une fonctionnalité faiblement adoptée aura un impact négatif sur la rétention).
Pour quel projet en particulier cette collaboration doit devenir incontournable ?
Tous projets data contenant une part de dataViz, de dataStoryTelling, ou plus largement tous projets de mise en forme de résultats ou de création d’outil d’aide à la décision, nécessitent la collaboration avec un UX.
Mais également, tous projets UX où l’on doit comprendre le ressenti de l’utilisateur, dans lequel on doit évaluer l’impact final du produit sur l’ensemble des utilisateurs.
Demain on pourra donc anticiper des besoins client avant même que ces besoins émergent ?
Oui car la bonne donnée permet d’apporter le bon service au bon moment.
Quelle ligne ne doit-on pas dépasser ?
La ligne éthique ! Même si le désir de trouver tel ou tel résultat peut être fort, torturer la data dans tous les sens via des calculs ou de la mise en forme pour essayer de lui faire dire ce qu’on souhaite n’est jamais une bonne solution à long terme, sans parler des problèmes déontologiques que cela pose.
Il y a un juste équilibre à trouver dans un binôme UX – data qui fonctionne. Les métiers sont très différents, les manières de travailler le sont souvent aussi.
C’est aussi ça qui est challengeant et passionnant : fusionner deux méthodes de travail afin de confronter les avis, les problématiques et les enjeux pour in fine, proposer quelque chose de pertinent et efficient.